Stratégies philanthropiques et gestion de patrimoine : 5 tendances clés en 2023

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La philanthropie s’impose comme une composante stratégique incontournable de la gestion de patrimoine moderne, notamment chez les familles fortunées et les grandes entreprises. En effet, allier dons et optimisation du patrimoine permet de répondre à des enjeux complexes, allant de l’impact sociétal à la planification successorale. Le contexte actuel, marqué par des défis sociaux et environnementaux croissants, ainsi que par des réformes fiscales fréquentes, pousse de plus en plus de clients à combiner valeurs personnelles et gestion financière. Mais quelles sont les meilleures pratiques pour intégrer efficacement la philanthropie à la gestion de patrimoine ? Et comment les gestionnaires de fortune et les entreprises accompagnent cette transformation ? Cet article explore cinq piliers essentiels des stratégies philanthropiques en 2023.

Comprendre l’évolution des pratiques philanthropiques

La philanthropie moderne dépasse largement son image traditionnelle de simples dons ponctuels. Elle est désormais perçue comme un outil stratégique à part entière dans la construction et la transmission du patrimoine. Selon le « World Wealth Report 2023 » de Capgemini, 83 % des individus fortunés interrogés déclarent vouloir allouer une partie significative de leurs actifs à des initiatives à impact sociétal. En parallèle, plus de 60 % d’entre eux mentionnent la philanthropie comme une composante clé de leur planification successorale. Cela illustre une évolution dans les mentalités, où la richesse n’est plus seulement un levier de pouvoir économique, mais également un outil d’engagement éthique.

Cette dynamique s’appuie sur une diversification des moyens d’action. Historiquement concentrée sur de simples donations, la philanthropie s’étend désormais à des solutions plus complexes comme la création de fondations familiales, les fonds ciblés et même l’investissement à impact (impact investing). Ce dernier, qui représente plus de 715 milliards d’euros d’actifs mondiaux sous gestion en 2022 selon l’IFC, attire tout particulièrement ceux qui veulent allier rentabilité et transformation sociale.

En outre, l’évolution réglementaire dans de nombreux pays, avec des incitations fiscales de plus en plus attractives pour les dons, amplifie cette tendance. L’introduction, par exemple, de déductions fiscales sur les dons immobilisés ou sur des legs dans certains pays européens a largement favorisé leur adoption.

Structurer son patrimoine autour de fondations et de fonds de dotation

La création de fondations reste, à ce jour, l’un des moyens les plus structurés et populaires pour engager une philanthropie durable. Ces entités juridiques permettent de canaliser des ressources sur des projets précis tout en offrant une gestion à long terme du capital dédié à l’action philanthropique.

Les fondations d’utilité publique et abritées

En France, les familles ou entreprises soucieuses de jouer un rôle durable dans la société optent souvent pour la création de fondations reconnues d’utilité publique ou encore de fondations abritées. Ces structures leur permettent de financer des initiatives dans des domaines comme l’éducation, la santé ou l’environnement. Une des caractéristiques clés de ces modèles est qu’ils permettent aux donateurs de structurer leurs efforts autour d’un cadre légal et fiscal précis. Par exemple, un individu peut y injecter des actions cotées, des biens immobiliers ou un capital en liquide tout en bénéficiant d’une exonération fiscale sur les revenus générés par ces actifs.

Une alternative simplifiée pour les philanthropes moins aguerris est le recours aux fonds de dotation. Ces derniers, particulièrement prisés pour leur flexibilité, permettent aux contributeurs de déposer un capital initial destiné à financer des initiatives spécifiques, avec une gestion simplifiée quant aux obligations administratives.

 Exemple concret

Prenons l’exemple d’une famille fortunée ayant vendu son entreprise familiale. Afin d’avoir un impact durable tout en optimisant son patrimoine fiscal, elle choisit de transférer une partie de la plus-value à une fondation abritée spécialisée dans la recherche médicale. Résultat ? Une exonération significative sur les plus-values tout en contribuant au financement de la recherche sur des maladies rares.

Legs testamentaires et planification successorale

Au fil des années, le legs philanthropique a gagné en popularité comme méthode d’intégration de la générosité dans une démarche long-termiste. Cette pratique permet aux familles fortunées de désigner une organisation caritative ou une fondation bénéficiaire d’une partie de leur patrimoine après leur décès. L’un des attraits majeurs de ce type de contribution réside dans ses avantages fiscaux.

Exonération fiscale sur les legs

En France notamment, les successions laissées à des organismes qualifiés d’intérêt général sont intégralement exonérées de droits de succession. Une étude menée par France Générosités en 2022 montre d’ailleurs que les legs philanthropiques représentent désormais 30 % des financements collectés par les grandes ONG françaises. Cela montre bien l’intérêt croissant pour cet outil, qui permet non seulement de transmettre une part de son patrimoine sans fiscalité, mais aussi de perpétuer ses valeurs au-delà de sa vie.

Encadrement familial et transmission d’un héritage moral

Même dans les familles avec héritiers réservataires, il est possible d’utiliser efficacement les mécanismes de dons ou de legs tout en impliquant fortement les descendants. Certaines familles optent pour des structures collectives, comme une fondation familiale, pour transmettre non seulement leur capital matériel mais également leurs valeurs et engagements sociaux. Cette dynamique renforce le dialogue intergénérationnel et permet une gestion concertée du patrimoine.

Le rôle clé des cabinets de gestion de patrimoine

Pour accompagner cette évolution vers une gestion patrimoniale intégrant la philanthropie, les gestionnaires de patrimoine jouent un rôle central. Ces professionnels agissent comme de véritables architectes, construisant avec leurs clients des structures adaptées à leurs besoins financiers, juridiques et éthiques.

Accompagnement personnalisé

Un bon gestionnaire prend en compte des éléments essentiels : ce que le client veut transmettre, comment il souhaite structurer son engagement, et quelles causes lui tiennent à cœur. Par exemple, certains gestionnaires proposent de réaliser des audits de profil philanthropique pour aligner les ambitions humanitaires aux stratégies financières.

Expertise en fiscalité et réglementation

Les cabinets spécialisés sont également des experts dans l’optimisation fiscale des dons. Dans un pays comme la France, où les donations peuvent être déduites du revenu imposable (jusqu’à 66 %, voire 75 % dans certains cas d’urgence humanitaire), ces spécialistes conseillent souvent d’étaler les donations sur plusieurs années pour maximiser les abattements fiscaux.

Travail collaboratif

Enfin, l’accompagnement ne se limite pas au conseil financier. De nombreux cabinets coordonnent leurs efforts avec des experts juridiques, des fiscalistes ou encore des associations spécialisées pour garantir un impact maximal. Cette approche collaborative renforce la crédibilité et l’efficacité des stratégies proposées.

Philanthropie et image de marque : un levier stratégique pour les entreprises

Au-delà de l’intérêt fiscal ou patrimonial, la philanthropie devient également un levier stratégique puissant pour valoriser l’image de marque des entreprises. En 2023, 76 % des consommateurs déclarent préférer acheter des produits ou services issus d’entreprises engagées dans des causes sociales ou environnementales, selon une étude du cabinet Deloitte.

 Engagement sociétal des leaders d’entreprise

Les grands dirigeants n’hésitent plus à lier leur nom à des actions philanthropiques majeures. Par exemple, le philanthrope américain MacKenzie Scott, ex-épouse de Jeff Bezos, a récemment injecté près de 14 milliards de dollars de ses actifs dans des actions caritatives globales. Ce genre d’initiatives contribue à solidifier l’image publique d’un leader tout en inspirant d’autres chefs d’entreprises.

Programmes RSE intégrant des volets philanthropiques

Pour les entreprises, notamment celles de taille intermédiaire, intégrer la philanthropie dans leur stratégie de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est devenu indispensable. Cela peut se traduire par des fonds de dotation internes, des partenariats avec des ONG ou encore des initiatives volontaires d’employés. À terme, ces actions renforcent à la fois l’engagement interne et la fidélité des parties prenantes externes.

Rentabilité et réputation

L’association entre philanthropie et gestion patrimoniale ne doit pas être considérée comme une dépense à fonds perdu. De nombreuses entreprises constatent une amélioration de leurs performances grâce à une meilleure perception de leur marque. En combinant des projets philanthropiques bien conçus, elles attirent des investisseurs, des clients et des talents qui partagent des valeurs similaires.

En 2023, philanthropie et gestion de patrimoine vont de pair plus que jamais. Face aux besoins croissants d’équité sociale et d’innovation durable, les donateurs – qu’ils soient des individus fortunés ou des entreprises – repensent leur approche pour maximiser tant l’impact que les avantages fiscaux. La collaboration avec des experts en gestion de patrimoine, ainsi que l’utilisation d’outils juridiques et financiers adaptés, ouvrent la voie vers une philanthropie stratégique et transformatrice.