Donald Trump, ancien président des États-Unis et figure emblématique du populisme économique, est pressenti pour effectuer un possible retour à la Maison-Blanche en 2025. Avec ce come-back se profile une réinstauration de ses politiques économiques protectionnistes. Ces stratégies, caractérisées par des droits de douane universels et des tensions commerciales exacerbées, présagent d’importantes répercussions, tant sur l’économie mondiale que sur celle de la France. Si certaines nations pourraient être frappées de plein fouet, d’autres, comme la France, verraient des effets plus diffus mais potentiellement durables. La question demeure toutefois : quelle sera l’ampleur de ces impacts et dans quelles mesures ces politiques façonneront-elles le paysage économique des années à venir ?
Sommaire
- 1 Un retour du protectionnisme à marche forcée
- 2 Conséquences mesurées mais tangibles pour l’économie française
- 3 Menaces pour l’automobile : une redistribution des cartes
- 4 Impact sur la stabilité financière mondiale et la domination du dollar
- 5 Interconnexion des politiques économiques et incertitudes globales
Un retour du protectionnisme à marche forcée
Donald Trump prévoit de relancer ses mesures protectionnistes, déjà amorcées entre 2017 et 2021. Parmi elles, une taxe universelle de 10 % sur toutes les importations américaines figure au premier plan. En 2025, ces décisions auraient des implications massives pour les échanges commerciaux mondiaux. Selon des données de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’instauration de telles taxes pourrait entraîner une contraction des échanges globaux de 3,3 %, soit un niveau similaire à celui enregistré lors de la première année de la pandémie de Covid-19.
Particulièrement visée, la Chine pourrait subir des droits de douane quasi punitifs estimés entre 60 % et 100 % dans certains secteurs-clés comme les technologies ou l’acier. Les exportations chinoises vers les États-Unis, qui représentaient 506 milliards de dollars en 2021 selon les chiffres du Bureau du recensement des États-Unis (U.S. Census Bureau), pourraient ainsi se contracter de 80,5 %. À l’inverse, les exportations américaines vers la Chine, qui s’élèvent à environ 151 milliards de dollars, pourraient également chuter de 58 %, aggravant ainsi un déséquilibre déjà existant dans le commerce international.
Pour des économies tiers, ces décisions représentent une perturbation potentielle majeure. L’Union européenne pourrait devoir redistribuer ses chaînes d’approvisionnement, tandis que les pays émergents risquent de se trouver coincés au milieu de batailles commerciales entre grandes puissances. Ces chocs pourraient remodeler significativement l’ordre économique mondial, augmentant les risques de fragmentation des marchés.
Conséquences mesurées mais tangibles pour l’économie française
Sur le papier, l’économie française s’avère relativement isolée des répercussions directes de ces nouvelles tensions commerciales. Une étude réalisée en 2023 par le Centre d’Études Prospectives et d’Informations Internationales (CEPII) estime une baisse marginale de 0,1 point du PIB français. Ce chiffre, bien qu’apparemment modeste, recèle toutefois des implications plus complexes.
La Chine, notamment, pourrait reconfigurer sa stratégie économique en redirigeant une partie de sa production actuellement orientée vers les États-Unis vers les marchés européens, dont la France. Une hausse des importations chinoises à bas prix pourrait simultanément accroître le pouvoir d’achat des consommateurs français, tout en fragilisant certains secteurs industriels locaux. Les industries françaises, en particulier celles déjà touchées par la concurrence internationale, comme le textile ou l’électronique, pourraient subir des pertes de compétitivité accrues.
Dans le même temps, des secteurs stratégiques comme le luxe, dépendants des exportations vers la clientèle chinoise, pourraient être affectés par un ralentissement économique en Chine. Ainsi, les chaînes de valeur globales, auxquelles la France est profondément intégrée, pourraient essuyer des perturbations importantes. À cela s’ajoute l’incertitude pesante sur la reprise économique post-Covid en Europe, laquelle reste déjà vulnérable face à des chocs externes.
Menaces pour l’automobile : une redistribution des cartes
Le secteur de l’automobile, cœur industriel de plusieurs économies européennes dont la France, pourrait être particulièrement touché. Cette industrie, souvent dépendante des échanges transatlantiques, fait face à des menaces directes suite à des mesures incitatives de Donald Trump visant à rapatrier la production de véhicules aux États-Unis. Lors de son premier mandat, Trump avait déjà utilisé un mélange de droits de douane élevés et de réductions fiscales appliquées pour inciter les constructeurs à relocaliser leurs chaînes de production.
Pour les constructeurs français comme Renault et Stellantis (fusion entre PSA et FCA), une telle politique pourrait se transformer en double peine. D’une part, les véhicules importés vers les États-Unis, marché phare pour Stellantis, deviendraient nettement plus onéreux en raison des surcoûts douaniers. D’autre part, la réallocation de ressources vers le marché américain pourrait détourner les investissements des fabricants des infrastructures européennes, retardant l’adoption de technologies vertes comme les véhicules électriques.
En parallèle, la rivalité accrue entre l’Europe, les États-Unis et la Chine pour capter la domination sur le marché des véhicules électriques pourrait voir les entreprises européennes handicapées par des subventions ou politiques fiscales protectionnistes mises en œuvre par d’autres grandes puissances. À titre d’exemple, des subventions d’énergie domestique peu coûteuses, comme celles introduites par la Loi sur la Réduction de l’Inflation (IRA) sous l’administration Biden, ne feraient que se renforcer dans un contexte compétitif similaire.
Impact sur la stabilité financière mondiale et la domination du dollar
L’éventuel retour de Trump pourrait également introduire un risque accru d’instabilité financière mondiale. Son approche musclée vis-à-vis des politiques monétaires pourrait compromettre l’autonomie de la Réserve fédérale des États-Unis. Selon une étude publiée en 2023 par le Fonds monétaire international (FMI), davantage d’interférences entre la Maison-Blanche et la Réserve fédérale pourrait susciter une perte de confiance dans le dollar américain, toujours majoritairement utilisé dans les échanges mondiaux (environ 58 % des réserves mondiales en devises selon le FMI).
Ces répercussions ne se limiteraient pas aux États-Unis. Une détérioration de la crédibilité du dollar pourrait aboutir à une volatilité accrue des marchés des changes, affectant directement la zone euro. La Banque centrale européenne (BCE) pourrait alors se voir contrainte d’ajuster ses propres politiques monétaires. Une augmentation des taux d’intérêt américains pour contrer la critique d’inflation aux États-Unis pourrait inévitablement se répercuter en Europe, aggravant le coût de refinancement pour des nations déjà lourdement endettées comme la France.
Enfin, dans un tel contexte d’inflation potentiellement élevée, des mouvements de panique des investisseurs sur les marchés pourraient peser sur des segments d’actifs comme les obligations d’État, exposant ainsi la France et d’autres économies européennes à de nouveaux défis budgétaires imprévus.
Interconnexion des politiques économiques et incertitudes globales
Bien que la France puisse s’avérer relativement épargnée par les répercussions directes des politiques de Donald Trump, les effets indirects dictés par les chaînes d’approvisionnement, les flux financiers et la géopolitique ne doivent pas être sous-estimés. La France n’opère pas dans une bulle isolée. L’interconnexion croissante des économies, amplifiée par des échanges commerciaux représentant plus de 30 % du PIB français en 2023, souligne à quel point le moindre ébranlement dans les dynamiques globales peut avoir des répercussions locales significatives.
Alors que le monde se prépare potentiellement à plusieurs années de pressions commerciales renouvelées, les décideurs politiques français et européens devront trouver un équilibre subtil. Ces préparatifs incluent à la fois des ajustements stratégiques aux tensions commerciales et une adaptation des politiques industrielles pour maintenir un certain leadership sur les marchés mondiaux. Si les prévisions actuelles illustrées par des chiffres restent prudentes, seule la réalité d’un retour de Donald Trump en 2025 permettra d’évaluer pleinement les réels contours de ces bouleversements économiques.